Enquête « Meanwhile, in Fukushima »// Le trois mars// Benjamin Efrati
Dans le cadre de l’enquête « Engagement, Résistance, Usage Social » sur la participation au projet de Dominique Balaÿ « Meanwhile, in Fukushima », voici les réponses au questionnaire de Benjamin Efrati pour sa pièce : Le trois Mars.
Pour écouter le trois mars : ici.
Pourquoi avez-vous choisi de participer au projet « Meanwhile, in Fukushima » ? En quoi
« fukushima » est-il un événement pour lequel on peut s’engager ?
J’ai découvert le projet alors que je vivais au Japon, et la raison principale de ma participation est la sensation que le problème était incommunicable. Il m’a semblé qu’il était en fait important de dire que l’on ne peut pas dire.
I discovered the project while I was living in Japan, and the main reason of my participation is the sensation that the problem was incommunicable. It seemed to me that it was actually important to say that nothing can be said.
Pouvez-vous décrire la pièce que vous avez proposée à « Meanwhile, Fukushima » ?
La significatogenèse est un procédé de création inventé par Mario Amehou en 2006.
Il s’agit de générer des significations arbitraires à partir d’associations fortuites, et de maximiser la polysémie des éléments mis en lien (dans le travail artistique) de manière à dénoncer l’habitude que l’esprit a de compenser, de rationaliser, de rendre signifiantes les chaines associatives.
« Le trois mars » est une mise en scène de la significatogenèse sous la forme d’un faux documentaire radio.
L’enjeu est double: piéger l’auditeur, et le lui dire.
Pourquoi piéger? Par refus de l’habitude, ou plutôt de la banalisation de l’horreur. Ma position vis-à-vis de l’art engagé a longtemps été très claire, trop claire, caractérisée par une méfiance de l’instrumentalisation d’un discours politique aux fins d’un non-discours. De fait, je regrette de constater que les idées politiques s’instrumentalisent en art à des fins commerciales. « Le 3 mars » est une dénonciation des fausses dénonciations, qui affirme la force significatogène des rapports de traduction, d’exotisme, d’idées reçues…
Significatogenesis is a creation process invented by Mario Amehou in 2006.
It consists in generating random signification and maximizing the polysemy of all the elements gathered (in the work of art) in order to attack the mind’s habit of compensating, rationalizing, basically making significant chains of association.
« The third of march » is a staging of significatogenesis, under the form of a fake radio documentary.
Two distinct goals are at stake: tricking the audience, and making them know about it.
Why tricking? A simple refusal of habits, or rather of trivialization of horror. My position regarding commited art was quite clear, maybe too clear. I distrusted political discourses, estimated they were too often instrumentalized for the benefit of a non-discourse. « The third of march » is a denunciation of fake denunciations, which insists on the significatogenetic power inherent in relating translation, exoticism, popular thinking…
Quels sont les choix sonores, de compositions, de dispositifs… qui traduisent votre engagement ?
Ou comment votre engagement passe-t-il dans votre musique ?
J’ai choisi d’utiliser des textures sonores enregistrées dans un salon de go, car je suis fasciné par la manière dont ce jeu, étape après étape, instaure une ambiance de cruelle fatalité.
I chose to use sound textures recorded in a go-salon. I am mesmerized by how this game, step by step, establishes a mood of cruel fatality.